Étudier l’arme sous-marine allemande et la Bataille de l’Atlantique nous emmène à parler d’un film, un seul : Das Boot. Automne-hiver 1941, base de La Rochelle. En cette veille de départ en patrouille, des équipages, dont celui de l’U-96, organisent une dernière beuverie avant de reprendre la mer, comme si cette soirée allait être la dernière. Sur terre, le Grand Reich recule à l’Est. Dans les océans, l’arme sous-marine allemande subit de plein fouet la riposte alliée. Certains officiers se laissent aller à railler le « génie » stratégique de leur Führer. Déjà, les sous-mariniers s’imposent comme des hommes différents.
Das Boot n’est pas un film sur la claustrophobie, sentiment qui colle à la peau des sous-mariniers qui vivent avec tout au long de leur patrouille. C’est d’abord et avant tout l’histoire d’une patrouille dans l’étroitesse d’un U-Boot. Tourné comme un documentaire par Wolfgang Petersen, ce film est largement inspiré du livre Le Styx, de Lothar-Gunther Bucheim ; le Styx : ce fleuve qui mène aux enfers.
Sans aucun élément patriotique, ce qui rajoute à la pression et au suspense, le film montre simplement la vie à bord d’un sous-marin à travers les yeux d’un jeune officier-reporter de guerre qui va, au fil de la mission, s’imposer parmi l’équipage, et finalement, être accepté par ces hommes comme un membre à part entière de l’U-96. L’oeil critique du reporter, au départ impressionné par la machine autant que par les hommes, nous permet de plonger à bord de cette vie pas comme les autres, de suivre toute une galerie de personnages complexes, et, en premier le lieu, le commandant, le Kaleunt trentenaire (Jürgen Prochnow) mais déjà considéré comme un « vieux » par ses hommes. Le Kapitanleutnant n’est pas un nazi mais avant tout un soldat aimé de ses hommes. Il est véritablement leur guide dans cette patrouille au bout de l’enfer, celui en qui ils ont toute confiance. A ses côtés, des hommes qui ont laissé leur vie à terre ; d’autres qui n’attendent rien sinon de faire leur devoir et de rentrer vivant. Le jeune Premier officier de quart, ancien des Hitlerjugend, national-socialiste convaincu, changera lui aussi au contact des ses coéquipiers, modifiera sa perception de la guerre et de son devoir.
Grâce à la maîtrise de Petersen et son équipe qui utilisent des techniques de tournage nouvelles comme le steadycam, le spectateur devient progressivement acteur, et suit toutes les phases d’une patrouille de son début à son retour. L’appareillage d’abord, et la fierté que peuvent éprouver les membres d’équipage pour leur bâtiment ; la sortie de La Rochelle en fanfare ; l’interminable attente d’une mission dans l’ennui et les exercices censés pousser hommes et U-Boot jusqu’à leurs ultimes limites, le tout, baigné par la célèbre musique de Klaus Doldinger ; les nerfs des sous-mariniers autant que ceux des spectateurs sont mis à rude épreuve notamment lors du passage du détroit de Gibraltar où l’U-96 doit se faufiler à travers une ligne de destroyers britanniques…
Brillant film sur les U-Boote, et avant tout excellent film de guerre, au même titre que Croix de fer, Das Boot mérite amplement sa place dans le très bel ouvrage de Steven jay Schneider, 1001 films à voir avant de mourir.
Das Boot, de Wolfgang Petersen (1981), director’s cut. 2 DVD, 5 heures.
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